Justice

Les cartouches de cigarettes volées chez Geodis avaient été retrouvées à Angers chez un buraliste

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Un patron de bar d’Angers (Maine-et-Loire) a été condamné ce mercredi 28 mai 2025 par le tribunal correctionnel de Nantes pour le « recel » de cigarettes qui avaient été volées en février 2022 à une entreprise de logistique et de transport routier.

Ludovic XXX était en effet le patron du Victor-Hugo, un tabac-presse situé près du Parc Desjardins, quand les douaniers avaient retrouvé en juillet 2022 dans ses réserves 121 cartouches de cigarettes volées cinq mois plus tôt à Geodis, dont les entrepôts sont implantés rue du Bêle à Nantes (Loire-Atlantique).

Un « vol par effraction » avait en effet été constaté à « 6h du matin » sur un semi-remorque par le chauffeur routier qui devait le conduire : le cadenas avait été « forcé » et de la « poudre blanche » se trouvait aussi « au sol », avait-il expliqué aux enquêteurs. Le chauffeur n’avait « touché à rien » mais avait simplement pu voir que « 87 colis » ne se trouvaient plus à l’intérieur, soit « 226.000 € » de valeur marchande, a expliqué la présidente du tribunal correctionnel de Nantes à la lecture des pièces du dossier.

Le « seul carton » resté à l’intérieur du semi-remorque était en fait celui qui « contenait la balise » qui permet de savoir en temps réel où se trouve le camion. Le véhicule se trouvait par ailleurs exceptionnellement « à l’extérieur » du site de Geodis alors que « la procédure imposait qu’il soit à l’intérieur », a fait observer la magistrate.

UNE « FUITE TRES PROBABLE DU SERVICE LOGISTIQUE »

Comme « très vraisemblablement pas grand’monde n’était au courant » de cette situation, les enquêteurs avaient donc émis l’hypothèse que « quelqu’un de l’entreprise » soit impliqué dans ce vol. La piste d’une « fuite très probable du service logistique », composé de « quatorze personnes », avait aussi été étudiée. Ces voleurs « tout sauf bêtes » n’avaient toutefois pas facilité la tâche des policiers puisqu’ils avaient « vaporisé » le camion à l’aide d’un extincteur pris sur un autre semi-remorque « pour ne laisser aucune trace papillaire ».

Les enquêteurs avaient simplement pu constater que « le grillage de l’entreprise avait été découpé sur 2,50 mètres » plusieurs heures avant les faits et qu’il y avait « des traces de pneus dans l’herbe ». Les auteurs du vol n’ont donc « pas été interpellés » à ce jour, a résumé la présidente du tribunal correctionnel de Nantes, mais le dossier avait été « réactivé » cinq mois plus tard quand les douanes avaient « informé » la police de la découverte chez un marchand de tabac d’Angers (Maine-et-Loire) de 121 cartouches volées cette nuit-là.

Ludovic XXX – âgé aujourd’hui de 47 ans – avait confirmé qu’il avait « des difficultés financières » : après le confinement imposé par la pandémie de Covid-19, il n’avait « plus suffisamment d’argent pour acheter la marchandise de façon légale ». Un « individu » – dont il a refusé de donner le nom – lui avait alors « proposé » de lui vendre « à un tiers » de leur valeur des cartouches de cigarettes. Le buraliste angevin se serait ainsi vu remettre, à crédit, « trois cartons de 50 cartouches » contre l’engagement de payer « 15.000 € » à son fournisseur.

Ce « joueur » qui avait « perdu beaucoup d’argent » et devait « 8.000 € à La Française des Jeux » avait aussi des problèmes « de santé » puisqu’il buvait à l’époque « quinze-vingt bières par jour » dans le bar qu’il tenait en parallèle de son tabac-presse. Il souffre d’ailleurs d’une « pancréatite » et de « diabète », a-t-il été précisé lors de son procès à Nantes ce mercredi 28 mai.

« UN BON SAMARITAIN QUE VOUS NE CONNAISSEZ NI D’EVE NI D’ADAM »

« Donc, un bon Samaritain que vous ne connaissez ni d’Eve ni d’Adam vous remet ces 15.000 € de cartouches sans que vous ne versiez rien », a résumé, sceptique, la présidente du tribunal. « Qu’une personne arrive comme ça, par hasard, venir boire un verre à votre bar, ça paraît étrange… Vous deviez connaître un tantinet ceux qui ont fait le coup. »

Ce père de trois enfants – qui est « séparé » de sa femme « depuis cette période » – a toutefois maintenu qu’il n’avait « rien à dire » sur le sujet. Il a depuis « coulé » son tabac-presse et se contente de tenir son « bar pur » actuellement en redressement judiciaire, qui emploie un salarié. « C’est mieux depuis six mois : je vais peut-être faire mon meilleur mois », a dit Ludovic XXX à la présidente du tribunal qui l’interrogeait sur son activité. « C’est une bonne nouvelle pour les parties civiles », a aussitôt réagi la magistrate.

Sur le plan de la santé, l’ancien marchand de tabac a « perdu 30 kg » et ne boit désormais plus que « deux-trois verres après la fermeture » de son bar alors qu’il buvait « beaucoup beaucoup » avant. Sur un plan judiciaire, il avait déjà été condamné « six fois » entre 2004 et 2016 pour « conduite en état d’ivresse », « travail dissimulé » et déjà du « recel » d’objets volés. Il avait écopé à chaque fois de « prison avec sursis » ou de « jours-amende », a détaillé la présidente du tribunal correctionnel de Nantes à la lecture de son casier judiciaire.

« Comme vous, je trouve dommage qu’on n’en connaisse pas plus sur les circonstances », a regretté un responsable de Geodis, présent à l’audience mais qui ne s’est pas constitué partie civile. « Le préjudice matériel est faible pour nous, mais ce n’est pas notre premier braquage : c’est le troisième… Cela génère une appréhension et une peur du métier chez les salariés. »

UN « DOSSIER ASSEZ INEDIT »

La représentante des douanes a pour sa part souligné le caractère « assez inédit » de ce dossier puisque c’est « un préposé de l’administration » qui est jugé : ce « débitant de tabac » était même allé jusqu’à « exposer » les paquets de cigarettes recelées « sur les présentoirs » de son commerce. Sur les 150 cartouches recelées, 29 ont ainsi été vendues avant l’intervention des douanes et 121 étaient encore en réserves et ont été restituées à Geodis ; elle avait donc demandé au total 14.532 € pour les taxes dont l’Etat a été privé.

« Les vendeurs de cigarettes sont eux-mêmes les principales victimes de la contrebande de cigarettes… C’est un peu curieux d’en trouver un aujourd’hui à cette barre » a commenté pour sa part le procureur de la République. Il avait donc réclamé douze mois de prison avec sursis probatoire à l’encontre de Ludovic XXX ; cela permettait de mettre une « petite pression » sur le patron de bar pour qu’il respecte une « obligation de soins » qui « ne peut pas faire de mal », avait-il justifié.

« Monsieur a souffert d’un alcoolisme sévère… Tout cela a été source de difficultés psychiques, de santé et de dérapages tels que celui-ci », avait recontextualisé l’avocat de la défense. « Cette proposition lui a été faite au comptoir par une personne qu’il connaît vaguement. C’est vrai que ce n’est pas usuel d’avoir un débitant de tabac à votre barre : ces personnes sont toujours triées sur le volet pour leur bonne moralité. Or, avant ses problèmes d’alcoolisme, mon client n’avait jamais péché par des comportements déviants ou malhonnêtes. »

Le tribunal correctionnel de Nantes a finalement condamné Ludovic XXX à douze mois de prison avec sursis simple et à une amende de 2.000 € pour ce « recel » et cette « détention frauduleuse en vue de la vente de tabacs fabriqués ». Le patron de bar angevin devra également payer aux douanes 14.532 € d’amende « proportionnelle » pour les « droits éludés » et 2.612 € pour « l’action civile », a dit la présidente./GF

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