Justice

La prison des « Misérables » à Angers va devoir remédier à ses conditions de détention

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DR – Le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a fait « injonction » à l’État de prendre plusieurs mesures « dans les plus brefs délais » pour remédier en partie aux conditions de détention « indignes » de la maison d’arrêt d’Angers (Maine-et-Loire).

En novembre 2022, au terme d’une « visite inopinée », le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) avait en effet déjà conclu « à la particulière vétusté de l’établissement, à son caractère exigu et à une situation de surpopulation ». Deux visites de l’Ordre des avocats du barreau d’Angers en mars et juillet 2025 avaient permis de souligner la « persistance » de cette situation de « surpopulation carcérale » puisque l’établissement présente « un taux d’occupation de 229 % » avec 464 détenus pour 266 places.

Les détenus eux-mêmes avaient pris publiquement la parole dans un courrier envoyé à la presse locale : ils demandaient aux pouvoirs publics de les « sauver » de cette situation. « Cette prison a été construite en 1856, à une période contemporaine des Misérables », avait recontextualisé le jour de l’audience Me Frédéric Raimbault, le bâtonnier en exercice du barreau d’Angers. « Malheureusement, Victor Hugo ne serait pas dépaysé s’il revenait aujourd’hui et il pourrait écrire exactement le même roman. »

La représentante de l’administration pénitentiaire et la directrice de la maison d’arrêt avaient alors « reconnu la gravité » des constats faits par les requérants et cette « promiscuité incompatible avec les standards de dignité que nous nous efforçons de préserver ». Mais ces conditions de détention résultent d’un « déséquilibre structurel », avec un bâti « qui ne correspond plus aux exigences de salubrité » actuelles ; un « projet ambitieux » de nouvelle prison verra donc le jour « dans les années à venir », avaient-elles promis.

DES « RIDEAUX » VONT ENTOURER LES TOILETTES EN CELLULE

Au bout du compte, parmi toutes les demandes faites par l’Ordre des avocats du barreau d’Angers, la Section française de l’Observatoire international des prisons (OIP-SF) et l’Association des avocats pour la défense des personnes détenues (A3D), le juge des référés du tribunal administratif de Nantes n’en a retenu que quelques-unes dans son ordonnance en date du 12 septembre 2025, qui vient d’être rendue publique.

L’administration a ainsi été contrainte de « rehausser la fréquence de mise à disposition de linge de lit propre », de réparer les « fenêtres et robinetteries défaillantes », de remplacer « l’ensemble des carreaux cassés », de procéder au « cloisonnement des toilettes » dans les cellules à l’aide de « rideaux déployés sur tout la hauteur des sanitaires », d’équiper chaque cellule d’une poubelle « dotée d’un dispositif de fermeture et de taille adaptée » au nombre d’occupants et de remplacer les « mobiliers de rangement les plus vétustes ».

Pour le reste, les requérants ont été déboutés. L’OIP et l’A3D voulaient par exemple « fournir gratuitement des désodorisants permettant de contenir les mauvaises odeurs liées à l’utilisation des toilettes dans les cellules collectives » et mettre fin à « l’encellulement à trois personnes ». Mais « l’administration ne dispose d’aucun pouvoir de décision en matière de mises sous écrou », rappelle sur ce point le juge. « Une maison d’arrêt est tenue d’accueillir, quel que soit l’espace dont elle dispose, la totalité des personnes mises sous écrou. »

La plupart des « injonctions » faites par les requérants relèvent aussi de « mesures d’ordre structurel » qui sont « insusceptibles d’être mis en oeuvre (…) à très bref délai ». « Elles ne sont pas au nombre des mesures d’urgence » qu’un juge des référés peut ordonner. Leurs recours ont toutefois eu pour mérite d’activer l’administration pénitentiaire : une « commande importante de rideaux » a déjà été faite pour « cloisonner » les toilettes et « 250 abattants » seront installés « prochainement » pour « améliorer les conditions d’hygiène ».

« L’administration s’est engagée lors de l’audience à renforcer la fréquence des opérations de nettoyage des cours, actuellement effectuées deux fois par semaine par des auxiliaires [des détenus qui travaillent pour le compte de l’administration pénitentiaire, ndlr] », souligne le juge des référés du tribunal administratif de Nantes. Enfin, concernant les risques d’incendie évoqués par les requérants, « si l’administration indique qu’elle n’a plus à ce jour de stock d’oreillers ignifugés, la commande est en cours de formalisation ». L’Etat devra au passage verser une somme globale 1.200 € à l’ordre des avocats d’Angers et aux deux associations pour leurs frais de justice./MJ et GF

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