Social
Jeunes majeurs en fragilité : une charte pour renforcer l’accompagnement vers l’autonomie dans le Maine-et-Loire

Le chiffre a de quoi interpeller : près de la moitié des sans-abris âgés de 18 à 25 ans ont été confiés à l’Aide sociale à l’enfance, alors qu’ils représentent seulement 2 % de la population générale. Une réalité mise en lumière par le dernier rapport de la Cour des comptes et qui pousse le Département de Maine-et-Loire à renforcer ses actions à destination des jeunes en fragilité. Ce mercredi, une charte de collaboration a été officiellement signée avec les établissements habilités ASE et les Résidences Habitat Jeunes (RHJ), afin de mieux structurer et sécuriser leur passage vers la vie adulte.
« Comment assumer humainement cette réalité ? » interroge Florence Dabin
Pour Florence Dabin, Présidente du Département, l’enjeu est profond et humain avant tout. Elle raconte avoir été alertée dès 2021 sur « l’angoisse » que suscite pour beaucoup de jeunes placés l’approche de leur majorité. « Alors que la plupart des jeunes voient arriver leurs 18 ans comme une chance, ceux que nous accompagnons vivent cette transition avec inquiétude. » Elle déplore le terme de « sorties sèches », qu’elle juge « horrible », tant dans le mot que dans ce qu’il décrit.
La Présidente insiste sur la responsabilité collective : « Comment peut-on assumer ça humainement parlant ? Quel avenir pour notre jeunesse ? » Elle dit puiser sa détermination dans les rencontres régulières avec les jeunes de l’ASE, « des yeux qui pétillent », et dans la confiance qu’ils accordent aux équipes. « Notre rôle est d’anticiper, de comprendre leurs préoccupations, de préparer leur projet et de faire en sorte que ce passage à la majorité soit sécurisé. »
Florence Dabin rappelle également le travail engagé au niveau national au sein de Départements de France et la volonté locale de renforcer la coopération avec les Résidences Habitat Jeunes. Elle salue « le travail de confiance entre les services » et la capacité des équipes à remettre en question certaines pratiques, citant notamment l’implication de Mathieu Guerry. « Nous faisons de très belles choses, mais nous devons être encore meilleurs. Et nous le serons ensemble, unis par le sens de nos actions et par les réussites des jeunes. »
Les établissements de protection de l’enfance face à la réalité de l’autonomie
À ses côtés, Rebecca Marias, directrice de la Maison d’Enfance à Caractère Social Marie Durand, souligne les défis rencontrés par les jeunes accompagnés. Elle rappelle que, contrairement à beaucoup de leurs pairs, ils doivent composer avec deux échéances strictes : « La première, celle des 18 ans, qui peut les pousser à claquer la porte de l’institution ; la seconde, celle des 21 ans, après laquelle la protection de l’enfance ne peut plus intervenir. »
Elle observe chez ces jeunes une forte volonté de se détacher de la vie collective, mais aussi une méconnaissance de leurs propres fragilités : isolement, difficultés administratives, gestion du logement, risques liés à l’absence d’assurance. « La prise d’autonomie ne se fait pas à 18 ans et une minute. » Pour elle, les résidences Habitat Jeunes constituent une étape essentielle : un espace où l’on peut conserver un appui éducatif, bénéficier d’une dynamique collective et éviter l’isolement, tout en avançant vers le droit commun.
Elle voit dans la charte un outil crucial pour « recentrer les énergies au bénéfice des jeunes », faciliter les parcours, limiter les sorties sans accompagnement et renforcer la collaboration à l’échelle du territoire.
Habitat Jeunes : un partenariat historique et un soutien indispensable
Anne-Marie Potot, présidente de l’association Habitat Jeunes David d’Angers, a rappelé le rôle majeur du Département dans le développement des structures d’habitat jeunes. « Vous nous soutenez dans les investissements à la pierre de nos structures, mais aussi dans nos projets socio-éducatifs, avec le versement de la prestation socio-éducative. » Elle évoque également le soutien apporté au projet HTH, Habitation Temporaire chez l’Habitant, « un projet alternatif d’hébergement temporaire sur différents territoires ».
Si elle regrette une baisse globale des financements, elle tient à souligner un engagement essentiel : « Merci aux élus de continuer à maintenir ces financements, ce que certains départements n’ont pas fait. » L’accueil des jeunes de l’ASE, rappelle-t-elle, fait depuis longtemps partie du public accompagné. La charte signée aujourd’hui permettra, selon elle, « de renforcer nos relations professionnelles avec les services du Département et de fluidifier encore davantage les parcours de ces jeunes, pour les aider à devenir les citoyens autonomes de demain ».
Une mobilisation collective pour sécuriser les parcours
En réunissant autour d’une même table les acteurs de la protection de l’enfance, de l’accompagnement éducatif et de l’habitat des jeunes, cette charte pose les bases d’un travail plus fluide, mieux coordonné et surtout centré sur la singularité de chaque jeune. Une démarche que Florence Dabin résume par une conviction forte : « Savoir que des adultes posent un regard bienveillant, accompagnateur, confiant et optimiste, c’est aussi cela la force de la douceur, la signature de notre département. »
Par cette dynamique renouvelée, le Maine-et-Loire espère offrir à chaque jeune accompagné un passage à l’âge adulte moins abrupt, plus structuré et porteur d’espérance.
