Un ex-footballeur du FC Nantes et du SO Cholet impliqué dans un réseau de livreurs « Uber shit »

Le parquet général de la cour d’appel de Rennes a requis, ce jeudi 30 octobre 2025, l’aggravation de la peine infligée en première instance à un footballeur de Goven (Ille-et-Vilaine) passé par le FC Nantes (Loire-Atlantique) et le SO Cholet (Maine-et-Loire).

Pour rappel, Ulrich XXX faisait partie des onze prévenus condamnés le 28 mai 2025 par le tribunal correctionnel de Nantes pour avoir participé au déploiement d’un réseau « Uber shit » à Nantes et sa périphérie entre septembre 2021 et décembre 2023.

Ce jeune footballeur de 23 ans a officié en Nationale 3 avec le FC Nantes, avant d’évoluer au SO Cholet (Maine-et-Loire) en 2020 – où il a joué quelques matchs en National – avant de rejoindre donc le SC Goven (Ille-et-Vilaine) en septembre 2024. Originaire de Nantes, il s’en est aujourd’hui « éloigné » pour s’installer près de Rennes.

Identifié comme le « livreur principal » ayant « pris du grade » pour devenir « directeur des ressources humaines » du réseau, il avait écopé de trois ans de prison ferme mais avait été assigné à résidence sous surveillance électronique à Rennes dans l’attente de son procès d’appel. Ses complices avaient quant à eux écopé de peines allant jusqu’à dix ans et huit mois de prison ferme. Quatre d’entre eux ont ainsi comparu détenus devant la cour d’appel de Rennes, entre mardi 28 et jeudi 30 octobre 2025.

DES « CENTAINES » DE CLIENTS ET « 1,7 MILLION D’EUROS » DE CHIFFRE D’AFFAIRES

Le 5 juillet 2022, une « information anonyme » était en fait parvenue aux enquêteurs nantais : une « annonce » faisant la « promotion d’une livraison de stupéfiants à domicile » – cocaïne, cannabis et ecstasy – à Nantes et ses alentours était diffusée sur des « réseaux cryptés ». Ce réseau était d’une ampleur « significative » : le chiffre d’affaires total était estimé à « plus d’1,7 million d’euros » et les clients se comptaient « par centaines ».

Il était « ancré » dans le quartier du Breil-Barberie, à Nantes, où habitaient notamment Youenn XXX – qui projette de s’installer à Angers (Maine-et-Loire) à sa libération pour travailler dans une ferme – et Salah XXX.

Ces jeunes cousins nantais de 25 et 23 ans étaient en fait les « chefs » de cette organisation depuis qu’ils avaient « fusionné » les trafics qu’ils géraient séparément en juillet 2022. Ils étaient précisément chargés de « diriger le réseau », de gérer les « ressources humaines » et « l’approvisionnement ». Leur « salaire » hebdomadaire pouvait ainsi atteindre « 6.000 € ».

Sofiane XXX, un autre cousin de Youenn XXX et Salah XXX, avait été identifié comme le « bras droit » et « l’homme à tout faire » du réseau : ce jeune de 24 ans s’occupait des « commandes », de « l’approvisionnement des livreurs » et de la « comptabilité ».

LES LIVREURS DEVAIENT TRAVAILLER « UN PEU PLUS LES SOIRS DE MATCH »

Aucun « point de vente » physique n’avait toutefois été identifié dans cette entreprise familiale : la drogue était livrée à domicile sur commande auprès d’un « numéro de téléphone » diffusé sur les réseaux, grâce à des « véhicules de location » qui effectuaient de fréquents « allers-retours » entre Nantes et sa périphérie.

Le réseau s’appuyait sur un « nombre limité de livreurs » – surtout des jeunes femmes – qui devaient « travailler tous les jours » et « un peu plus les soirs de match ». À leur tête se trouvait donc Ulrich XXX, qui était rémunéré « entre 200 et 300 € » par tournée.

Le footballeur – déjà interpellé fin 2022 pour un « refus d’obtempérer » alors qu’il possédait « cocaïne et méthamphétamine » – était également chargé de « sous-traiter » son activité à d’autres livreurs à mesure que le trafic gagnait en importance. Devant les enquêteurs, Ulrich XXX avait reconnu son implication mais niait être « monté » dans la hiérarchie.

L’argent de ce trafic était ensuite « blanchi » notamment dans le financement d’un « kebab » par les deux « associés » Youenn XXX et Anouar XXX. L’entreprise avait d’ailleurs été condamnée en première instance à une amende de 5.000 € et à une « fermeture définitive » pour « blanchiment aggravé ». Un « salon de coiffure » à Saint-Nazaire, dont Salah XXX était l’un des « gérants associés », avait aussi été utilisée pour blanchir les fonds du trafic.

PLUS DE 100.000 € DEPENSES SUR WINAMAX

Une autre partie de ces sommes servait à financer les « paris sportifs » de Youenn XXX : il avait reconnu devant les enquêteurs être « accro aux jeux » et avoir dépensé plus de 103.000 € sur la plateforme Winamax. Salah XXX et lui s’étaient également offert un « onéreux » voyage à Dubaï (Émirats Arabes Unis) alors qu’ils n’avaient pourtant déclaré « aucune activité professionnelle » auprès des autorités.

La filière « approvisionnement » du réseau était gérée quant à elle par Bruno XXX, un « producteur de musique » nantais de 32 ans. C’est lui qui avait écopé de la plus lourde peine en première instance : le tribunal correctionnel de Nantes l’avait condamné à dix ans et huit mois de prison ferme.

Des « armes » et des « munitions » avaient également été retrouvées à son domicile. Sa compagne était aussi « associée » au trafic « au moins sur le plan de la comptabilité ». Elle avait écopé d’un an de prison avec sursis et de 10.000 € d’amende.

Bruno XXX approvisionnait en fait le trafic grâce à un homme originaire de Roubaix (Nord) qui faisait des « allers-retours réguliers » à Nantes, mais aussi via un trafiquant guyanais surnommé « L’Ancien » qui recrutait des « mules » chargées d’acheminer de la cocaïne par « voie aérienne » depuis la Guyane et le Suriname. La drogue était ensuite récupérée en région parisienne puis transportée à Nantes par Lybento XXX, un habitant de Tremblay-en-France (Seine-Saint-Denis).

UN KEBAB A LA SAUCE BLANCHIMENT

Une information judiciaire avait été ouverte le 2 mars 2023 et les enquêteurs avaient procédé à des interpellations en décembre 2023. Douze prévenus – dont la société qui exploitait le kebab blanchissant l’argent du trafic – avaient été renvoyés devant le tribunal correctionnel de Nantes. Si le nouveau propriétaire du kebab avait été relaxé de « complicité de blanchiment », les autres avaient écopé d’un an de prison avec sursis jusqu’à dix ans de prison ferme. Huit d’entre eux avaient fait appel.

Devant la cour d’appel de Rennes ce jeudi 30 octobre 2025, l’avocate générale a requis l’aggravation de la peine prononcée à l’encontre d’Ulrich XXX. Elle a demandé que l’ancien footballeur du SO Cholet soit condamné à trois ans et demi de prison ferme et à une amende de 10.000 €, ainsi qu’à l’interdiction de porter une arme soumise à autorisation pendant cinq ans. « Malgré son souhait d’arrêter le trafic, il ne s’est pas donné les moyens d’exercer une autre activité », a-t-elle constaté.

Pour Youenn XXX, Salah XXX et Sofiane XXX, l’avocate générale a demandé que les peines prononcées à leur encontre – respectivement sept ans, huit ans et quatre ans de prison ferme – soient assorties d’un an de sursis probatoire, d’une obligation de s’acquitter des sommes dues au Trésor public et d’une interdiction de contact avec leurs co-prévenus. Leur « intelligence » et leur « capacité d’adaptation » pourront leur permettre « d’évoluer dans la vie dans des conditions normales à condition de choisir la bonne voie », pense-t-elle. Quant à Anouar XXX, Lybento XXX et Bruno XXX, l’avocate générale a requis à leur encontre la confirmation des peines prononcées en première instance.

Ce jeudi 30 octobre 2025, Me Elodie Moron, l’avocate du footballeur, a demandé à que son client ne retourne pas en prison et qu’il ait une peine qui « ne mette pas en péril sa situation stable depuis un certain temps ». La décision de première instance avait en effet « fait l’unanimité contre elle », s’est souvenu Me Benoit Poquet, qui défend Bruno XXX. Les peines prononcées étaient allées bien « au-delà des réquisitions extrêmement sévères », à la « stupéfaction » générale. Il a donc demandé à la cour d’appel de « redonner à ce dossier les proportions qui sont les siennes ». La cour se prononcera d’ici un mois et demi./RB, CB et GF