Justice
L’entraîneur d’un club d’athlétisme d’Angers suspendu de fonctions après une plainte pour « agression sexuelle »
Un éducateur de l’Entente Angevine Athlétisme (E2A) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, ce lundi 13 novembre 2023, de suspendre l’interdiction d’exercer qui lui a été faite le 18 octobre 2023 suite à une « plainte en gendarmerie » d’une jeune athlète pour « agression sexuelle ».
L’avocat de Sébastien XXX estime en effet que le préfet de Maine-et-Loire a été trop « hâtif » dans ce dossier ; il reproche à son arrêté d’être « insuffisamment motivé » et d’être entaché d’une « erreur manifeste d’appréciation ».
Son client – un « coureur de marathons » qui « se préparait » à faire le marathon de La Rochelle (Charente-Maritime) ce dimanche 26 novembre 2023 – n’était pas présent à l’audience « pour raisons psychiques », selon Me Patrice Hugel : il trouve ces accusations « insupportables » et « ne comprend pas » qu’une « relation amicale comme celle-ci ait pu dégénérer ainsi ».
Ce titulaire du brevet d’éducateur « depuis vingt ans » et à l’E2A « depuis dix ans » avait en fait commencé « en 2018-2019 » à nouer des « relations complices » avec une « ancienne étudiante » par le biais d’un « tutorat », a expliqué l’avocat au juge nantais.
IL LUI A « FAIT DES AVANCES » QU’ELLE A REPOUSSEES
Sébastien XXX lui aurait par la suite « fait des avances » lors d’une soirée où il la raccompagnait chez elle, mais celle-ci « se serait sentie agressée » et se serait « réfugiée chez une amie ». Elle aurait été « peut-être droguée », rapportera-t-elle ensuite.
Cette jeune athlète vendéenne « extrêmement vulnérable » et « polytraumatisée » par un « passé très compliqué » avait ensuite porté plainte « dans la foulée », a complété à l’audience le représentant de la préfecture. Véronique Agrapart, présidente de l’association Stop aux violences sexuelles (SVS) en Vendée, avait alors fait « un signalement » aux services de l’Etat.
« Le préfet a réagi très très vite – c’était nécessaire et obligatoire sans quoi il aurait engagé sa responsabilité – mais pour cela il faut avoir des éléments dans le dossier », a repris Me Patrice Hugel. Or, les éléments à charge sont « modiques », selon lui : ils se fondent sur des captures d’écran « de Snapchat »… alors que l’éducateur affirme qu’il n’a « pas de compte Snapchat ».
« Alors, tu as été faire ta petite rapporteuse ? », disait précisément l’auteur des messages sur Snapchat, selon les éléments lus à l’audience par le représentant de la préfecture. « Je suis entraîneur, j’ai des responsabilités, c’est très grave ce que tu as dit… J’aurais pu porter plainte contre toi pour diffamation. Tu vas briser ma vie : je vais être licencié à cause de toi. »
« PERSONNE NE TE CROIRA AVEC TON PASSE A L’ASILE »
L’interlocuteur de XXX regrettait juste d’avoir « eu le tort de tomber amoureux de toi » mais voulait se rassurer par le fait que « personne ne te croira avec ton passé à l’asile ».
Ce « faisceau d’indices » a donc laissé à penser aux services de l’Etat qu’il s’agissait bien de Sébastien XXX, même s’ils n’ont « pas d’éléments pour l’identifier » : « quelques jours » après que la jeune Vendéenne ait repoussé ses avances, il se serait adressé à elle – non pas cette fois-ci sur Snapchat mais « sur Messenger » – en la surnommant son « petit ange d’amour »…
Reste que l’avocat de l’éducateur est « gêné » par « l’acharnement » dont fait l’objet son client : « sidéré » d’avoir été suspendu « du jour au lendemain », Sébastien XXX vit dorénavant « cloîtré » chez lui et a « perdu beaucoup de poids ».
« Il n’a évidemment rien dit à personne », souffle Me Patrice Hugel. « Les athlètes qu’il encadre s’inquiètent, mais il ne peut pas répondre à tous les messages… Aujourd’hui, il est sous médicaments. »
UN « COUP DE POIGNARD DANS LE COEUR »
Il y a donc « urgence » à suspendre cette décision « radicale » « et « quelque peu rapide » du préfet de Maine-et-Loire : son salaire d’éducateur est « la seule source de revenus » de cet homme divorcé et père de trois enfants de 14, 17 et 20 ans. Me Patrice Hugel a par ailleurs produit « une attestation de son ex-compagne » et de ses « collègues » pour démontrer sa « probité ».
« Cela ne colle pas : comment peut-il avoir un discours bienfaiteur et protecteur, et devenir du jour au lendemain aussi agressif verbalement ? », s’est interrogé l’avocat angevin.
Même si cette suspension de fonctions n’a qu’un caractère « provisoire », le temps que l’enquête administrative soit menée, il vit cette « sanction » comme un « coup de poignard dans le cœur », affirme Me Patrice Hugel. Le juge des référés, qui a mis sa décision en délibéré, rendra son ordonnance « dans les meilleurs délais ».
Un recours « au fond » a été introduit en parallèle devant le même tribunal administratif de Nantes, ce qui signifie qu’une formation collégiale de trois juges se repenchera en tout état de cause sur le dossier d’ici dix-huit mois à deux ans, quelle que soit la décision du juge des référés. Si la décision venait à être déclarée illégale, alors l’encadrant sportif serait en droit d’introduire un nouveau recours contre l’Etat pour être indemnisé de ses divers « préjudices »./GF