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“Les filles du Bon Pasteur” : un scandale longtemps étouffé, mis en lumière par Affaires Sensibles

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“Les filles du Bon Pasteur” : un scandale longtemps étouffé, mis en lumière par Affaires Sensibles

Longtemps, on les a surnommées « les mauvaises filles ». Entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et les années 1980, près de 40 000 jeunes Françaises ont été placées par la justice dans les couvents de la Congrégation du Bon Pasteur, institutions alors présentées comme des « maisons de redressement » pour adolescentes jugées difficiles.
Aujourd’hui, des centaines d’anciennes pensionnaires dénoncent un système d’enfermement brutal, marqué par les humiliations, le travail forcé et les violences. L’émission Affaires Sensibles consacre une enquête fouillée à ce scandale resté longtemps dans l’ombre.

Placées pour des motifs souvent aberrants

Eveline, Marie-Christine et Lien ont toutes été envoyées au Bon Pasteur dans les années 1960. Elles avaient entre 13 et 16 ans. Les raisons de leur placement apparaissent aujourd’hui surréalistes : l’une est accusée de « manquer d’hygiène », une autre fait preuve d’un « esprit rebelle », la troisième sort trop souvent et serait, selon les autorités de l’époque, « une future prostituée ».

En réalité, moins de 10 % des filles enfermées au Bon Pasteur avaient commis un délit. L’immense majorité payait un désir d’indépendance mal vu, un comportement jugé trop libre… ou le fait d’avoir été victime d’agressions sexuelles. Dans une société encore corsetée, celles qui avaient « fait honte » à leur famille étaient éloignées, mises au secret.

Silence imposé et violences institutionnelles

Dans ces établissements, les religieuses imposent un régime particulièrement dur. Aucun enseignement scolaire, interdiction de parler, journées rythmées par les tâches ménagères et les ateliers de couture. Les témoignages évoquent une mécanique de brimades quotidiennes : maltraitances corporelles, humiliations publiques, isolement, jusqu’à des cas d’abus sexuels.

L’enfermement se révèle pour certaines insupportable. Des fugues se multiplient, parfois dramatiques. D’autres, brisées, mettent fin à leurs jours.

Briser l’omerta après des décennies

Il faudra attendre le début des années 2000 pour que les premières langues se délient. Le choc naît de la découverte du film The Magdalene Sisters, relatant l’enfermement de jeunes Irlandaises dans un couvent. « C’était mon histoire ! », raconte aujourd’hui Marie-Christine. En se connectant à des forums, elle découvre qu’elle n’est pas seule. Ce soir-là, dit-elle, « j’ai compris qu’il fallait parler ».

Peu à peu, les anciennes pensionnaires se regroupent. Elles fondent l’association Les filles du Bon Pasteur, qui rassemble aujourd’hui 300 femmes. Toutes réclament la même chose : des excuses officielles de la congrégation et la reconnaissance de la responsabilité de l’État dans leur placement abusif.

À l’approche de leurs 80 ans pour certaines, elles mènent un combat tardif mais déterminé. Auditionnées dans le cadre de l’affaire Bétharram par la Commission d’Enquête parlementaire sur les violences en milieu scolaire, elles espèrent enfin être entendues.

Une institution qui n’a jamais présenté d’excuses

La Congrégation du Bon Pasteur, qui n’accueille plus de mineures placées par la justice, a pris ses distances avec ses anciennes pratiques. Mais à ce jour, aucune excuse officielle n’a été formulée.

Pour les anciennes pensionnaires, cette absence de reconnaissance demeure une blessure vive.

L’enquête menée par Marine Haag, Adrian Jaouen, Arnaud Morel et Juliette Orcel pour Affaires Sensibles exhume ce chapitre sombre de l’histoire sociale française et donne enfin la parole à celles qui, pendant des décennies, n’ont pas pu la prendre.

À découvrir dimanche à 15h10 sur France 2.

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