Justice
« Gino » sous les feux croisés des juges dans l’affaire des incendies criminels des magasins Poêles & Cie

Le Gitan de 37 ans qui s’était évadé d’une activité extérieure au Planétarium de Rennes (Ille-et-Vilaine) et qui a servi d’intermédiaire entre le commanditaire des incendies de l’enseigne Poêles & Cie de Redon, Bain-de-Bretagne, La Mézière (Ille-et-Vilaine), Châteaubriant (Loire-Atlantique) et Segré-en-Anjou (Maine-et-Loire) a été condamné à deux ans et demi de prison, ce mardi 2 décembre 2025, par le tribunal correctionnel de Rennes.
Le Gitan de 37 ans qui s’était évadé d’une activité extérieure au Planétarium de Rennes (Ille-et-Vilaine) et qui a servi d’intermédiaire entre le commanditaire des incendies de l’enseigne Poêles & Cie de Redon, Bain-de-Bretagne, La Mézière (Ille-et-Vilaine), Châteaubriant (Loire-Atlantique) et Segré-en-Anjou (Maine-et-Loire) a été condamné à deux ans et demi de prison, ce mardi 2 décembre 2025, par le tribunal correctionnel de Rennes.
Tout avait commencé par un banal litige commercial entre Elodie XXX, une mère de famille, et les gérants de l’enseigne Poêles & Cie : cette cliente refusait de s’acquitter d’une facture. « Vous allez voir ce qui va se passer », leur avait-elle lancé au cours d’une « conversation houleuse ». « Des menaces à peine voilées », analyse aujourd’hui la présidente du tribunal correctionnel de Rennes.
En décembre 2022, les patrons de l’enseigne – aujourd’hui disparue – avaient été très rapidement contactés alors qu’un incendie vient de survenir dans leur magasin de Bain-de-Bretagne. Un boulanger de Retiers, ancien propriétaire d’un logement occupé par le « couple infernal » formé Elodie XXX et Quentin XXX, avait rapidement orienté l’enquête : il leur avait fait savoir qu’il a « lui-même eu des problèmes avec ce couple », la vitrine de son commerce ayant été dégradée à « trois reprises » suite, déjà, à « des impayés » de loyers.
L’huissier de justice mandaté pour recouvrer la dette contractée par Elodie XXX et son conjoint avait rapidement fait savoir aux gérants de Poêles & Cie que « tous ceux qui ont eu des litiges avec eux se sont retrouvés avec des incendies » : les magasins de Bain-de-Bretagne, Châteaubriant, Redon, Segré-en-Anjou ou encore La Mézière seront effectivement touchés, parfois à plusieurs reprises, à partir de décembre 2022.
En janvier 2023, les enquêteurs avaient donc lancé une « vague d’interpellations » : Elodie XXX avait été interpellée, tout comme Issam XXX, un habitant d’Angers (Maine-et-Loire). Mais le compagnon de la première, Quentin XXX, était resté introuvable ; après l’émission d’un mandat d’arrêt, il s’était finalement rendu de lui-même à la gendarmerie.
IL S’EVADE ET EST INTERPELLE JUSTE AVANT SON PROCES
Mais, malgré la neutralisation du couple et de complices, les incendies avaient continué. Le nom d’Emile Siegler – le codétenu de Quentin XXX, surnommé « Gino » – était alors remonté dans le dossier : Quentin XXX – un « fou dangereux », selon « Gino » – était même allé jusqu’à évoquer au téléphone un contrat à « 80.000 € » sur la tête du juge d’instruction en charge du dossier. Un proche de « Gino » sera par la suite reconnu sur la vidéosurveillance installée au domicile du juge d’instruction.
Connu pour de multiples vols et fort de ses « vingt-sept mentions » au casier judiciaire, « Gino » était accusé d’avoir servi « d’intermédiaire » à Quentin XXX – ce qu’il conteste – assurant seulement lui avoir rendu « des services » en prison comme de « l’achat de linge ». « Il n’avait pas besoin de moi, il pouvait payer n’importe qui dehors », se défend Emile Siegler.
Des échanges à propos de baskets « violentes et puissantes » interrogent pourtant : les deux hommes communiquent par téléphone, alors qu’ils sont tous deux derrière les murs. Mais « Gino » est formel : il a seulement aidé Quentin XXX à s’acheter des chaussures Dior à « 5.000 € » et à se procurer un portable pour « 1.000 € ».
Fin septembre 2025, un juge d’instruction du tribunal judiciaire de Rennes a pourtant estimé que Quentin XXX, Emile Siegler et une quinzaine d’autres protagonistes de ce dossier devaient comparaitre devant le tribunal correctionnel de Rennes dans cette affaire « hors normes ». Mais l’avocat de Quentin XXX a fait appel de cette décision : son client ira donc tout seul aux assises.
Et entre-temps, « Gino » a cru bon de s’évader « pour la quatrième fois » alors qu’il avait bénéficié d’une autorisation de sortie au Planétarium de la Cité des sciences de Rennes, le 14 novembre 2025. Dans l’intervalle, tous les prévenus de ce dossier – dont le frère de « Gino » – ont bénéficié d’une procédure dite de « plaider-coupable » : ils ont été condamnés à des peines allant du simple sursis à « trente mois » de prison ferme.
UN « CONTRAT SUR LA TETE » DE GINO
On lui reproche précisément d’avoir recruté « intermédiaires et exécutants », d’avoir « géré les affaires courantes » de Quentin XXX, « vérifié la bonne exécution » des incendies, « fourni des numéros de téléphone et des cartes SIM » et « trouvé des véhicules de location », liste la présidente du tribunal. Une infraction « fumeuse », balaye Me Arnaud Le Bourdais, qui plaide une relaxe totale.
La veille, son client a sollicité – et obtenu – le renvoi de son affaire d’évasion, censée être jugée en comparution immédiate. « J’ai été victime d’une tentative de meurtre, on m’a mis plein de coups de couteau dans la gorge en cour de promenade », se justifie-t-il ce mardi 2 décembre 2025. « Vous pensez que ces faits ont un lien avec notre affaire ? », l’interroge alors la présidente. « Gino » n’en « sai[t] rien », même s’il soupçonne avoir eu « un contrat sur sa tête »…
Outre son passage devant la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine, le « commanditaire » présumé des incendies devrait également comparaitre seul, d’ici quelques mois, devant le tribunal correctionnel de Rennes pour « cinq délits » : un pourvoi formé par son avocat est toujours en cours d’examen devant la Cour de cassation. Dans ce dossier « hors normes » mais toutefois « vidé de toutes ses composantes », selon l’avocat de « Gino », la configuration de cette audience correctionnelle prend donc une tournure « lunaire et inédite ».
Mais la procureure de la République, elle, estime que la culpabilité de Gino ne fait « aucun doute » : elle avait requis deux ans de prison ferme à son encontre et un mandat de dépôt. Au final, le tribunal correctionnel de Rennes l’a condamné à deux ans et demi de prison ferme.
Celui qui s’est récemment dit « fatigué » par les années de prison n’en a toujours pas fini avec la justice : le 22 janvier 2026, « Gino » pourra enfin s’expliquer sur les conditions de son évasion « dans un contexte plus apaisé », comme l’espérait ce lundi 1er décembre 2025, lors de l’audience de renvoi, son avocat. »Vous êtes des racistes », s’est emporté « Gino » en apprenant la décision : il a d’ores et déjà annoncé vouloir faire appel./CB et GF
