Justice
Au procès des fusillades de Nantes, la défense dont celle d’un angevin, doute de l’impartialité du président de la cour d’assises
Les avocats de la défense ont vivement critiqué ce jeudi 23 janvier 2025 l’impartialité du président de la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine chargée de juger les sept hommes – dont un père de famille de Cholet (Maine-et-Loire) – accusés d’avoir participé aux trois fusillades survenues à Nantes (Loire-Atlantique) en avril 2019.
Le procès s’était à vrai dire déjà ouvert, le mardi 14 janvier 2025, dans un contexte de grande tension : un dispositif de sécurité particulier a été mis en place aux abords du Parlement de Bretagne, entièrement bouclé, et la défense avait d’emblée soutenu avec succès une demande de mise en liberté pour l’un des accusés. Concrètement l’intéressé reste toutefois détenu – pour une autre affaire – mais son titre de détention avait expiré sans que ni le président de la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine ni l’avocate générale ne s’en soient aperçus…
En fin de journée, mercredi 22 janvier 2025, les avocats de la défense se sont de nouveau montrés offensifs en demandant « un projet écrit » des questions sur lesquelles la cour allait être amenée à se pencher pour établir, ou non, la culpabilité et les peines de ces sept hommes accusés de « tentatives de meurtre » ou de délits connexes. L’objectif : « indiquer le ou les faits matériels » susceptibles de fonder une éventuelle condamnation et permettre aux avocats de savoir concrètement sur quoi ils devaient argumenter dans leurs plaidoiries.
Ce jeudi 23 janvier 2025, le président de la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine a donc soumis un « projet écrit » aux avocats de la défense, mais ces derniers l’ont balayé d’un revers de main, le jugeant « illégal ». Me Raphaël Chiche a pris la parole pour déplorer la manière « vague » dont les questions avaient, à ce stade, été formulées par Nicolas Léger-Larue de Tournemine pour le délit connexe d’association de malfaiteurs. « En refusant de préciser cette question, vous ouvrez la voie à l’arbitraire », a-t-il insisté.
UN MAGISTRAT SURNOMME « MONSIEUR PLUS »
Les avocats de la défense ont donc exhorté le magistrat à « sortir de l’ambiguïté », remettant ainsi en cause l’impartialité du magistrat rennais surnommé « Monsieur Plus » par les détenus, de l’aveu-même d’un accusé : il est connu à Rennes pour sa particulière sévérité.
En l’état, les questions envisagées par la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine ne disent pas « en quoi on estime que telle personne peut être accusée d’association de malfaiteurs », a exposé Me Raphaël Chiche, qui assure la défense du supposé « bras droit » d’Issam XXX, le « patron des patrons » du trafic de drogues sur Nantes accusé d’avoir orchestré ces représailles contre un concurrent accusé de « casser les prix » du marché local des stupéfiants.
Dans leurs écritures, Mes Chiche et Ruben ont rappelé qu’il fallait précisément viser les actes constituant ce délit connexe, en l’occurrence, « l’acquisition ou la possession d’armes », la « fourniture de véhicules volés » et le « stockage du tout », comme exposé dans l’arrêt de mise en accusation. « Le problème, c’est que depuis quinze jours notre adversaire devrait être l’avocat général et qu’en fait, c’est vous », a tonné Me Thomas Bidnic, pour réclamer « la base de la base », à savoir la « sortie de l’ambiguïté » du président, « préjudiciable aux accusés ».
« La défense joue à faire des paris, mais ce n’est pas un jeu », a rétorqué Me Carole Verdu, avocate de parties civiles, à propos de cette « véritable « mascarade » conduite par « des gens (…) qui viennent aujourd’hui chialer pour leur vie alors qu’ils ont mis la vie des autres en danger ».
L’avocate générale a pour sa part considéré que les jurés étaient « tout à fait éclairés » et que l’incident n’était « pas fondé ». « On comprend que ça vous échappe », s’est en retour moqué l’un des avocats de la défense. Plus tard dans la journée, le parquet a requis des peines allant de sept ans – pour deux hommes, dont le Choletais – à vingt-sept ans de réclusion criminelle. Trois plaidoiries sont encore attendues ce vendredi 24 janvier 2025 avant que la cour ne parte délibérer. Le verdict sera rendu dans la foulée./CB