Justice

Cdiscount flouée par un escroc du Maine-et-Loire « jovial » et « très sympathique »

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Un habitant de Sèvremoine (Maine-et-Loire) a été condamné ce mercredi 21 février 2024 par le tribunal correctionnel de Nantes pour les multiples « escroqueries » qu’il avait commises au préjudice du site de vente en ligne Cdiscount pendant cinq ans, entre 2014 et 2019, à Nantes puis Saint-Brevin-les-Pins (Loire-Atlantique)

Kévin XXX avait en fait été incarcéré à deux reprises dans cette affaire, initialement qualifiée d’escroquerie « en bande organisée » : il avait fait l’objet d’un premier mandat de dépôt le 13 février 2020 avant d’être remis en liberté sous contrôle judiciaire neuf mois plus tard… puis de faire l’objet à nouveau d’un mandat d’arrêt le 27 juin 2022 puis d’être de nouveau libéré sous contrôle judiciaire le 5 avril 2023.

Le prévenu avait été démasqué au terme d’un banal contrôle routier : de « multiples colis filmés » avaient été découverts dans la Mercedes Classe C qu’il conduisait ce jour-là, ainsi qu’un pistolet d’alarme dans la boîte à gants.

Une perquisition dans un appartement de la rue Augustin-Fresnel, dans le quartier de la Bottière à Nantes, avait permis de retrouver de « multiples objets » qui avaient été « achetés sur des marketplaces » et qui étaient « rangés par catégories ». Une somme de 18.000 € avait également été saisie dans un second appartement où le nom de Kévin XXX apparaissait, toujours à Nantes.

70 CARTES D’IDENTITE RETROUVEES

Pas moins de soixante-dix cartes nationales d’identité et sept permis de conduire avec de faux noms avaient encore été retrouvés lors de la perquisition : ils servaient au prévenu pour faire les « multiples achats » repérés sur ses comptes bancaires ouverts sous de fausses identités. Kévin XXX avait ainsi fait près de 95.000 € d’achats et généré 29.000 € de bénéfices, ont calculé les enquêteurs.

Ses fausses identités lui avaient aussi permis de louer l’appartement de la rue Augustin-Fresnel grâce à de faux bulletins de salaire, dont le propriétaire s’était constitué partie civile pour se faire rembourser les loyers impayés : ce locataire était pourtant « jovial » et « très sympathique ». « Le jour où la police est venue, je suis tombé des nues », a-t-il déclaré ce mercredi 21 février 2024 à la barre du tribunal correctionnel de Nantes.

Suite à cette première interpellation, le prévenu avait changé son fusil d’épaule : il avait « récupéré des lots entiers de cartes bancaires sur le darknet » pour « faire vivre des comptes sur eBay ». Pour ne plus avoir à gérer « le stockage » de ses colis et d’être « trop visible comme dans le premier système », il donnait comme adresse celle d’un ami de Saint-Brevin-les-Pins, Tony XXX, qui recevait « en contrepartie des cadeaux ou de la nourriture ».

Un second complice, Christophe XXX, avait aussi été identifié : lui « prêtait son visage et ses bras » à Kévin (XXXX} dans cette seconde version plus élaborée de son escroquerie. L’objectif était de « se faire suffisamment d’argent pour partir au Canada » en vacances, dira-t-il aux enquêteurs. Les trois hommes étaient en effet déjà partis « à Andorre » et « projetaient d’aller ensemble à La Réunion ».

« UN DOSSIER SYMBOLIQUE ET TYPIQUE D’UN ESCROC DE GRANDE AMPLEUR »

Le principal prévenu habite aux dernières nouvelles chez ses parents à Sèvremoine (Maine-et-Loire) cet « auto-entrepreneur » en dépannage et maintenance informatique a « choisi de mettre son savoir-faire au service de la légalité », a souligné son avocat Me Benoît Poquet. Son client était d’ailleurs absent à son procès car il se trouvait « à Montpellier pour conclure un contrat important avec une entreprise importante ».

Mais « c’est un dossier symbolique et typique d’un escroc de grande ampleur », a recadré la procureure de la République. « Son complice [de Saint-Brevin-les-Pins] a d’ailleurs dit avoir une certaine admiration pour lui : il avait « un don » pour cela, a-t-il lors de sa garde à vue. »

Kévin (xxxx} avait ainsi à son actif « une cinquantaine de numéros de cartes bancaires » et avait « créé des boutiques sur eBay » pour écouler ses biens payés avec ses comptes factices. « On n’est pas sur un escroc à la petite semaine qui vendrait sur Le Bon Coin : on a retrouvé du papier bulle et des enveloppes en grande quantité, comme dans une entreprise », avait insisté la représentante du parquet.

Dans ces conditions, elle n’avait pas prêté beaucoup de « crédit » à la reconversion du prévenu comme « auto-entrepreneur », lui qui avait « obtenu des diplômes de docteur en informatique sur le darknet ». Elle avait donc requis à son encontre deux ans de prison ferme, un avec sursis probatoire, une interdiction d’exercer une activité commerciale, une amende de 10.000 € à payer au Trésor public et la confiscation des scellés.

UN PEU PLUS DE 50.000 € A REMBOURSER A CDISCOUNT

« Cette escroquerie est tout sauf extraordinaire, elle est même d’une triste banalité », avait répondu l’avocat de la défense, Me Benoit Poquet. « Aujourd’hui, mon client veut refermer cette parenthèse judiciaire : il a connu un changement radical suite à sa deuxième sortie de détention. La première n’avait en effet pas eu les effets escomptés… »

Mais le tribunal correctionnel de Nantes a suivi en grande partie les réquisitions du parquet, pour cet homme déjà condamné six fois et qui a purgé « un an et vingt-et-un jours de détention provisoire » dans cette affaire. Il a écopé de deux ans de prison ferme et d’un autre avec sursis probatoire pendant trois ans. Cela l’obligera à travailler et indemniser les parties civiles ; Kévin (XXXX} aura aussi interdiction de gérer une société, ce qui lui permettra de continuer à travailler avec le statut de salarié. Il devra aussi payer une amende de 10.000 € au Trésor public.

Sur le plan civil, le principal prévenu devra verser un peu plus de 3.300 € au propriétaire de son ancien logement pour ses loyers impayés ; il devra surtout rembourser un peu plus de 50.000 € de dédommagements à Cdiscount pour son préjudice matériel après ses 311 commandes, 250 € pour son « préjudice d’image » dans cette affaire « qui avait été un peu médiatisée » selon son avocate et 1.200 € pour ses frais de justice. Il n’en a toutefois pas fini avec la justice : une autre procédure l’attend « à la Roche-sur-Yon », a fait savoir la procureure de la République.

Son complice Christophe XXX – jusqu’alors inconnu de la justice – a lui écopé d’un an de prison avec sursis simple ; Tony XXX – qui avait deux condamnations pour des affaires de stupéfiants – a lui été condamné à 180 jours-amende à 10 €, soit une amende de 1.800 € à régler sous six mois au Trésor public, sans quoi les jours non payés pourront être purgés derrière les barreaux d’une prison. Aucun des deux n’était présent ou représenté par un avocat à l’audience./GF 

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