Cholet
Le maire de Cholet a trouvé « la solution » pour que ses élus ne remboursent jamais leurs indemnités

La cour administrative d’appel de Nantes s’est repenchée ce mardi 9 septembre 2025 sur le dossier des indemnités de fonctions touchées à tort par les trente-trois élus de la majorité municipale du maire de Cholet (Maine-et-Loire), qui n’ont toujours pas été remboursées à la ville à ce jour.
Les élus d’opposition Jean-Michel Debarre, Murielle Courtay et Franck Loiseau avaient été contraints de saisir une nouvelle fois la juridiction pour qu’elle s’assure de « l’exécution » de son précédent arrêt de février 2024 : il avait fait « injonction » au maire (UDR) Gilles Bourdouleix de réclamer ces sommes aux élus de sa propre majorité.
Le rapporteur public, dont les avis sont souvent suivis par les juges, a d’abord confirmé ce mardi 9 septembre 2025 que le chiffre réclamé par le maire de Cholet n’était « pas inférieur » aux sommes qui avaient été versées à tort à son équipe.
« Un tableau établi par le comptable public retrace de façon précise, mois par mois, pour chacun des élus, les sommes versées… et il y en a même un peu plus, puisqu’il fallait retirer les 16.000 € versés à madame le maire du Puy-Saint-Bonnet [de l’époque, Florence Jauneault, ndlr], dont les indemnités étaient légales », a-t-il fait observer. Le « delta » entre le chiffre de 427.437 € et la « ligne budgétaire » de 764.250 € provisionnée au budget municipal « s’explique facilement » puisqu’il fallait « tenir compte des cotisations sociales » des élus, a-t-il dit.
« RIEN NE JUSTIFIE UNE TELLE INACTION »
En revanche, pour le reste, la mairie de Cholet « se borne à soutenir qu’elle ne peut assurer le recouvrement » des sommes en jeu dans la mesure où ses trente-trois élus avaient contesté devant le tribunal administratif de Nantes la légalité des « titres exécutoires » qu’elle avait émis et que cela « suspendait » leur mise en oeuvre effective. Des recours dont les « chances de succès » étaient « très faibles voire inexistantes », a fait observer le rapporteur public ; le tribunal administratif de Nantes les a d’ailleurs rejetés le 30 avril 2025.
« Cela ne rend pas la créance non exigible : il est possible de procéder à des retenues sur indemnités ou, a minima, d’émettre des mises en demeure », a fait observer au demeurant le magistrat. « Même s’il était fait appel du jugement, la suspension ne jouerait plus. » Au final « la commune n’a procédé à aucune diligence » pour récupérer les sommes qui lui reviennent, en a-t-il donc conclu. « Rien ne justifie une telle inaction alors que les titres exécutoires ont été émis il y a plus de deux ans. »
Le rapporteur public a donc proposé à la cour administrative d’appel de Nantes de donner « quarante-cinq jours » à la ville de Cholet pour qu’elle exécute une bonne fois pour toutes l’arrêt de 2024, sans quoi elle pourrait se voir infliger une astreinte de « 750 € par jour de retard ».
L’avocate de Jean-Michel Debarre, Murielle Courtay et Franck Loiseau a toutefois révélé que la municipalité était à présent prête à reconnaître sa propre « faute » dans cette affaire… et à conclure, en conséquence, des « protocoles transactionnels » avec chacun des élus forcés de rendre leurs indemnités ! « Ils freinent des quatre fers pour ne pas rembourser, on frôle l’intention délictuelle », a-t-elle halluciné. « Les élus de l’opposition sont vraiment peinés de cette situation sclérosée. » Elle a donc demandé aux juges de « taper du poing sur la table » dans « ce dossier quand même assez singulier » qui ressemble au « jeu du chat et de la souris ».
« CETTE AFFAIRE N’A QUE TROP DURE »
« J’entends que les élus de l’opposition sont peinés, je vais tenter de les rassurer », lui a d’abord répondu l’avocat de la ville de Cholet, satisfait que le rapporteur public ait écarté les chiffres « farfelus » avancés par l’opposition. Me Eric Boucher a aussi fait savoir que les élus de la majorité n’avaient « pas fait appel » du jugement validant les « titres exécutoires » qui ont été émis. Mais ces mêmes élus « se sont rapprochés de la ville » de Cholet : ils ont bel et bien « travaillé » entre 2020 et 2021 et ils « pouvaient donc bénéficier d’indemnités de fonctions ».
« La responsabilité administrative de la ville est susceptible d’être engagée en raison du préjudice qu’ils ont subi », en a-t-il déduit. « La solution qui a été trouvée, c’est que la commune a décidé de transiger avec les élus. En juillet 2025 le conseil municipal a approuvé cette solution, et les élus de l’opposition ont alors saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, qui les a déboutés en août 2025. La commune n’entend pas se soustraire aux décisions de justice : les élus s’engagent à rembourser effectivement la ville et on en justifiera. »
« La cour est extrêmement attachée à l’exécution de ses arrêts, et cette affaire n’a que trop duré », lui a répondu le président de la 4e chambre de la cour administrative d’appel de Nantes, qui a « préféré s’abstenir de polémiquer » sur ce dossier. « Nous, ce qu’on veut, c’est que nos arrêts soient exécutés. Point. »
L’avocate des élus d’opposition a fait savoir, à cette occasion, que lors du conseil municipal de ce lundi 8 septembre 2025, l’exécutif avait mis à l’ordre du jour le « retrait » de la délibération ayant acté en juillet 2025 le principe de ces « protocoles transactionnels » : le vote n’avait pas été fait à bulletins secrets… Une nouvelle délibération va donc devoir être votée sous peu, cette fois-ci dans les formes. La cour administrative d’appel de Nantes, elle, rendra son arrêt le 26 septembre 2025./GF (PressPepper)