Justice

Le vétérinaire « qui fait bouger les lignes » à Nantes et Angers traduit en chambre disciplinaire

Publié

le

DR

Le patron de la clinique vétérinaire « Mon Chat et Moi », qui a ouvert en septembre 2021 un établissement à Angers (Maine-et-Loire), a été traduit ce jeudi 13 avril 2023 devant la chambre disciplinaire de l’ordre régional des vétérinaires des Pays de la Loire.

Le Dr Cyril Berg se voit reprocher par ses instances ordinales d’avoir installé des confrères salariés sur ses sites d’Orvault et Rezé (Loire-Atlantique), près de Nantes, et de leur avoir fait assurer « de manière permanente » la gestion de ses deux établissements. Or, le code de déontologie de la profession impose que cette gestion soit assurée par l’associé en personne.

Le vétérinaire étant le seul associé dans les sociétés qu’il a créées et ayant « obligation » d’être présent « au moins 50 % » du temps dans chaque Etablissement de Soins Vétérinaires (ESV), le Conseil régional de l’ordre des vétérinaires (CROV) des Pays de la Loire en a déduit que cela reviendrait à le faire travailler « 89 heures » par semaine, ce qui n’est « pas possible ».

« On l’a vu chez les avocats, et j’en sais quelque chose : ça fait toujours un peu peur de voir arriver des gens qui font bouger les lignes », a répliqué l’avocat du Dr Cyril Berg, qui siège lui-même à la commission de discipline de sa profession.

LE VETERINAIRE « NE COMPREND PAS » CES POURSUITES

« En aucun cas il n’est indiqué dans les textes qu’un associé doit être présent au moins 50 % du temps » a-t-il ajouté. « Le CROV lui reprochait d’ailleurs au départ d’avoir fait assurer « de manière permanente » la gestion de ses établissements par des salariés, puis ensuite seulement « de manière habituelle »… Les mots ont leur importance, ce n’est pas la même chose. »

La chambre disciplinaire doit donc « entrer en voie de relaxe » à l’égard du vétérinaire nanto-angevin, de son point de vue. « Personne dans la clientèle ne s’est plaint qu’il n’assurait pas le service », a également fait observer l’avocat du Dr Berg. « J’aurais été plus gêné si un client avait souhaité absolument le voir, mais ce n’est pas le cas. Le fonctionnement des trois établissements est parfaitement huilé : on peut y faire soigner son chat sans qu’il n’y ait le moindre risque pour quiconque. »

L’avocat du Dr Cyril Berg a enfin conclu sa plaidoirie par un rappel à l’actualité : il avait entendu le matin-même « sur France Info » un sujet sur « la souffrance au travail » des vétérinaires français, qui a conduit plusieurs d’entre eux à se suicider. « Nous sommes trop dans nos cabinets, dans nos cliniques, à vouloir tout faire, sans jamais rien déléguer », en a-t-il déduit.

Son client a dit lui-même « ne pas comprendre » cette plainte de ses instances ordinales, alors qu’il était « bien dans son coin » à « faire son truc tranquillement » et qu’il est « investi » dans son métier de vétérinaire en faisant « un plein temps et demi ».

« PAS DE JURISPRUDENCE » SUR LE SUJET

« Je donne des responsabilités à des collaborateurs qui en ont envie : ça les aide à grandir et à rester dans la profession », a souligné le Dr Cyril Berg en écho aux propos de son avocat sur le turn-over qui touche les effectifs des cliniques vétérinaires.

Il a également fait observer que ses deux salariés d’Orvault et Rezé, les Dr Marc-Antoine Rappart et Ophélie Barrier, participaient au recrutement des « assistants vétérinaires » – même si c’est lui qui a « le dernier mot ». Il a aussi changé la dénomination de leurs postes : ils ne sont désormais plus « directeurs de site », mais simples « responsables de site ».

Le président du Conseil régional de l’ordre des vétérinaires des Pays de la Loire a convenu qu’il n’y avait « pas de jurisprudence » actuellement sur le sujet « mais qu’il fallait bien à un moment qu’il y en ait une ». « Sinon, où va-t-on s’arrêter ? », s’est demandé le Dr Hervé Bossy. « Si dans cinq ans le Dr Berg a quinze établissements, pourra-t-on toujours admettre qu’il y passe de temps à autre ? A un moment, ça va être dur de tenir… Il faut que la chambre disciplinaire y réponde. »

Le président du CROV a rappelé au passage qu’un vétérinaire associé était « responsable de la sécurité radiologique » des appareils utilisés dans ses cliniques. Or dans ce dossier « on a l’impression que le Dr Berg signe en bas de page », a-t-il soufflé.

UN DISCOURS « PASSEISTE » MAIS ASSUME

Le Dr Hervé Bossy assume donc « un discours passéiste ». « On a toujours fonctionné avec des associés dans la profession… Si demain on a des gens de moins bonne foi [que le Dr Berg, ndlr], ils vont s’engouffrer dans cette faille. Et où va-t-on s’arrêter ? Acceptera-t-on qu’ils soient présents dans leur établissement un centième de leur temps ? Un millième ? Un millionième ? »

« Compte tenu de l’importance des faits pour la profession », il a donc demandé à la chambre disciplinaire de prononcer « une sanction significative » à l’égard du vétérinaire nanto-angevin, mais sans en préciser la hauteur.

« Si je dois être condamné, alors je ne dois pas être le seul », a conclu le Dr Cyril Berg, en évoquant le cas de l’un de ses confrères de Derval (Loire-Atlantique) membre de la chambre disciplinaire. « Certains vétérinaires siègent dans des associations ou des formations disciplinaires où ils passent plus de la moitié de leur temps. »

La chambre disciplinaire de l’ordre régional des vétérinaires des Pays de la Loire, présidée par la juge honoraire de la cour d’appel de Rennes Andrée Georgault, a mis sa décision en délibéré. Elle la rendra dans un mois./GF (PressPepper)

La rédaction apporte chaque jour son lot quotidien d'information angevine, pour vous fournir l'essentiel de l'actualité de la journée.Vous avez une information urgente, pratique, n’hésitez-pas envoyez la nous sur redaction@my-angers.info