Justice

Les juges se posent devant la « saison 1 » des recours contre les élections internes à l’université d’Angers

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Françoise Grolleau, nouvelle présidente de l’Université d’Angers. ©Université d’Angers – Stéphane Steinmetz

Le professeur de droit public Clément Chauvet et plusieurs de ses colistiers ont demandé au tribunal administratif de Nantes, ce jeudi 18 avril 2024, d’annuler le résultat des dernières élections internes à l’université d’Angers (Maine-et-Loire).

Pour rappel, l’ancienne première vice-présidente Françoise Grolleau et sa liste « Réussir avec l’UA » étaient arrivées en tête le 31 janvier 2024, devant celle intitulée « Notre Université » du doyen de la fac de droit Christophe Daniel. La professeure en neurosciences avait ainsi été élue présidente du conseil d’administration de l’université d’Angers, avec le soutien de son prédécesseur Christian Roblédo.

Ce jeudi 18 avril 2024, la rapporteure publique a en partie donné raison à Clément Chauvet, codirecteur de l’Institut d’études judiciaires (IEJ) d’Angers et plusieurs autres membres de la liste perdante : elle a préconisé au tribunal administratif de Nantes d’annuler purement et simplement le résultat des élections au sein du « collège A », celui qui regroupe les « professeurs et assimilés » de l’université d’Angers (UA).

La magistrate – dont les avis sont souvent suivis par les juges administratifs – considère en effet que « trois électeurs n’auraient pas dû être inscrits » sur les listes de ce collège électoral… Or « seulement deux voix » ont séparé, au final, les deux listes concurrentes. L’un d’eux était en effet « attaché temporaire d’enseignement » et donc « pas professeur », tandis que les deux autres appartiennent à la « chaire des professeurs juniors ». Selon elle, ces deux derniers auraient dû être basculés dans le collège B, celui des « Autres enseignants » de l’université d’Angers.

UNE « QUESTION UN PEU INEDITE » POUR LES JURISTES

La rapporteure publique a exclu toute « manœuvre » de la présidence sortante ; reste qu’il est « impossible de savoir sur quelle liste » se sont portées les voix des trois électeurs « irrégulièrement inscrits ». « Vous ne pourrez qu’annuler l’élection du collège A », en a-t-elle déduit.

« Les collèges sont constitués par « Catégorie de personnel », et non pas par « Statut » ou par « Corps »... Cette définition a une visée fonctionnelle, et non statutaire », a objecté Me Frédéric Raimbault (Lex Publica), bâtonnier du barreau d’Angers et avocat de l’université dans ce dossier. « On peut donc procéder par assimilation, en faisant des rapprochements : or il se trouve que deux des trois électeurs litigieux ont la même formation et les mêmes obligations de service qu’un professeur des universités. Leurs fonctions sont donc parfaitement assimilables. »

C’est « une question un peu inédite », a convenu le président du tribunal administratif. Si lui et ses deux assesseures suivaient le raisonnement de l’université d’Angers, alors le résultat des élections serait validé : la seule voix litigieuse n’aurait pas pu renverser le résultat des élections. Mais le président n’a pas non plus fait mystère de ses « questions intérieures » sur le cas particulier de ces « professeurs qui enchaînent les CDD »

Concernant les autres collèges appelés à voter aux élections de l’université d’Angers, la rapporteure publique a cette fois-ci préconisé de rejeter le recours déposé par Clément Chauvet et ses colistiers. Le professeur de droit public estime pourtant que les règles de la « propagande » électorale ont été enfreintes par la liste gagnante ; il en veut pour preuve la « communication précoce illicite » de Françoise Grolleau et ses « diffusions massives et répétées » de courriels avec l’utilisation « probable » des fichiers de l’université.

« ETEINDRE LE FEU DE LA SAISON 1 »

« Ce qui pose problème, c’est l’égalité des chances entre les listes candidates : ce principe imposerait qu’il n’y ait pas de prime au sortant », a explicité Clément Chauvet à la barre du tribunal administratif de Nantes, ce jeudi 18 avril 2024. « On se demande comment Mme Grolleau a pu récolter toutes ces adresses courriel et confectionner cette liste d’envoi, chose que les autres listes n’ont pas été en mesure de faire. »

Il a aussi souligné que la « modération » des échanges dans le cadre de la campagne avait été confiée au directeur général des services (DGS) de l’université d’Angers, alors que « son sort personnel est lié au président », ce qui laisserait planer un doute sur son impartialité. Il a enfin appelé à faire preuve de « souplesse » et de « tolérance » dans ces scrutins « où il y a fort peu d’électeurs » puisque « chaque voix a beaucoup plus de poids ». « 

« Si vous rejetez les recours, rien ne se passera et l’université continuera de fonctionner », a donc résumé au final le professeur de droit public. « Si vous annuliez tous les scrutins, alors les différents conseils seraient tous dissous, un administrateur provisoire nommé et de nouvelles élections organisées. Mais les conséquences ne seront pas les mêmes si vous n’annulez que un ou plusieurs collèges : depuis les élections, des délibérations ont été prises par le conseil d’administration, et des recours vont être déposés en raison de sa composition irrégulière. »

« Le contentieux ne sera pas terminé », a redit en d’autres termes Clément Chauvet. « C’est le premier épisode d’un feuilleton, en attendant la suite », a donc « cru comprendre » l’avocat de l’université d’Angers. « Mais il est normal que l’administration universitaire ait commencé à travailler. » Le tribunal administratif de Nantes, qui a mis son jugement en délibéré, rendra sa décision prochainement pour « éteindre le feu de la saison 1 et en espérant qu’il n’y ait pas de saison 2 », a plaisanté le président./GF

MAJ 19/04 19H

Communication de l’Université d’Angers

Plusieurs recours avaient été déposés par des membres de la liste « Notre Université » portée par Christophe Daniel suite aux élections du mois de janvier ayant conduit à l’élection de Françoise Grolleau à la tête de l’UA. Vendredi 19 avril, le tribunal administratif (TA) de Nantes a rejeté tous les recours déposés par les requérants, à l’exception de celui concernant le collège A du Conseil d’administration. Conséquence : l’UA doit procéder à l’organisation de nouvelles élections pour ce collège qui ne concerne que les professeurs et personnels assimilés. Dans l’attente de ce nouveau scrutin, sur recommandation du ministère, le Conseil d’administration ne pourra plus se réunir avant juillet.

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